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Lollipop
24 avril 2010

Ugly Us

etreinteDepuis, je croyais pourtant avoir vécu des visages neufs, des souvenirs nouveaux, des lieux différents, entassé de nouvelles couches sur les anciennes, les avoir bien ensevelies, plus loin que le centre de la Terre. Je croyais que ça n’existait plus, ou bien que ça avait disparu ailleurs, ou encore que je m’en fichais. Cela ne comptait plus. C’était devenu acide, avait pourri, s’était mué en cendres que des vents tempétueux avaient soufflées. Si loin qu’aucun de nous deux n’envisageaient de les retenir ; elles glissaient trop entre les doigts et c'était alors de la poussière qui s’évanouissait presque aussitôt.

J’étais sur le canapé rouge. Les volets étaient fermés. Nous nous étions rapprochés de la télévision posées comme un cadre sur l’étagère bancale. C’était l’hiver. Je crois. Il n’habite plus à cet endroit à présent. Je ne parviens pas à me rappeler ce qui c’était passé ; au bout d'un certain temps les souvenirs deviennent des bulles d'émotions dont l'intellect et la vérité se défont. Nous nous étions éloignés doucement, détachant nos mains l’une de l’autre, se repoussant comme l’eau et l’air. Nos bouderies têtues marquaient nos tempéraments semblables, du moins en ce qui concerne les rapports de forces. J’ai toujours gagné. Sauf une fois, qui fut la dernière. Nous nous enterrions dans des tranchées de bougonnerie insondables et nos âmes attendaient mutuellement d'être déterrées ; nous faisions de nous-même des âmes pesantes sur lesquelles nous appuyions de tout notre poids.

J’ai été déblayée ce soir là. Mais pas tout de suite, ça a pris du temps. Il est d'abord allé se coucher. J’ai regardé l’épisode jusqu’au bout sans le voir. Je ne souviens ni du scénario, ni de la raison de notre guerre froide. J’avais creusé si profond mon trou que je voulais rompre à ce moment-là. Je suis en effet d’une maussaderie qui peut toucher à l’extrémisme et à l’intégrisme : mes mutismes sont des bombes à implosion.

« Pas toi !!! Pas toi !! » a-t-il hurlé soudain en bondissant de la chambre le visage écroulé de larme. « PAS TOI» a-t-il encore répété en morigénant et en gémissant. Je reçu les majuscules en pleine figure et oubliait alors derrière moi la porte de son appartement, entièrement sombre à présent, que je m’apprêtais à quitter. Un rai de lumière venant du couloir de l’étage et projetait une lueur ambrée et crue sur nos jambes. Alors qu’il se lançait dans un discours embrouillé de larmes je me ruais sur lui, le serrais de toute mes forces dans mes bras et embrassais ce petit être pour lequel, je le savais, ma vie venait irrémédiablement de basculer.

Je l’aimais, alors.

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